Qu’est-ce qu’une licence de marque ?

La licence de marque est une formule contractuelle de plus en plus plébiscitée par les enseignes commerciales souhaitant se développer en réseau d’indépendants.

Elle mérite d’être expliquée pour au moins 3 bonnes raisons :

  • Tout d’abord, c’est l’habillage le plus simple pour un réseau du commerce organisé indépendant ;
  • Ensuite, c’est le « premier étage de la fusée » que sont d’autres formules, la franchise en tête. D’ailleurs dans la littérature, on la compare et la définit souvent à contrario avec cette dernière, bien que chacune ait ses propres avantages ;
  • Enfin, il existe aujourd’hui différentes natures et nuances de licences, qui sont éclairantes des stratégies des enseignes aujourd’hui.

Cet article vous donne les bases pour mieux cerner cette notion plus riche qu’il n’y paraît, en comprendre le fonctionnement et les avantages avant, pourquoi pas, de l’envisager pour votre développement.

 

Bonne lecture,

I/ La licence de marque : de quoi parlons-nous ?

Quelques éléments de définition de la licence de marque

La licence de marque prend forme dans une convention par laquelle le propriétaire ou le titulaire d’une marque (concédant), autorise une entreprise (licenciée) à l’apposer sur un produit ou service dans un but publicitaire et commercial, pour une durée définie et moyennant une compensation financière (royalties).

La licence de marque suppose que son concédant dispose d’une marque valide, qu’il en soit propriétaire ou qu’il tienne lui-même d’un tiers propriétaire le droit de l’exploiter dans le cadre de sa propre licence. Et si la formule peut s’appliquer à titre exclusif, cela ne reste pas sa vocation première.

Ce jeu de clauses ou convention peut exister par lui-même ou bien s’intégrer dans une formule juridique plus complète du commerce organisé indépendant : franchise, concession, commission-affiliation… D’ailleurs, la franchise étant la figure de proue des formules du commerce organisé indépendant, on a pris l’habitude de définir par défaut la licence de marque en expliquant :

  • Qu’elle ne laisse que la possibilité d’exploiter un nom de marque, et sous des conditions strictes ;
  • Et qu’elle ne prévoit ni la transmission d’un savoir-faire, ni la fourniture d’une assistance technique et/ou commerciale.

La licence de marque s’inscrit dans un cadre réglementaire hybride

Si liberté contractuelle prime, elle demeure cependant soumise au respect :

  • Des règles de droit commun relatives aux contrats de louage, à savoir les articles 1709 et suivants du Code civil ;
  • De la loi n°64-1360 du 31 décembre 1964 relative au droit de propriété des marques, et des règles posées par le Code de la propriété En soi, elle s’apparente à un contrat de bail ou de louage encadré par la législation relative aux marques, et son article L 712-1;
  • Des dispositions générales relatives aux ventes des articles 1582 à 1593 du Code civil;
  • Enfin, des dispositions d’ordre public économique (droit de la concurrence et droit fiscal).

 

En savoir plus sur la protection juridique d’un concept.

II/ Une formule avantageuse qui gagne en popularité chez les enseignes

Des avantages nombreux, qui peuvent sembler déséquilibrés pour le licencié

Un nombre croissant de dirigeants songent à développer leur réseau en licence de marque pour :

  • Pénétrer sans risque commercial direct des marchés qui excèdent leurs capacités de prospection et d’exploitation propres. L’entreprise peut tester à plus grande échelle son produit et voir le comportement de ses ventes sur un marché élargi, et de nouveaux bassins de clientèle. Sur le principe, plus on accorde de licences, plus on développe sa notoriété ;
  • Bénéficier, par les techniques de licensing, d’une extension de leur marque à d’autres produits ou services que ceux pour lesquels elle est initialement connue. Attention cependant à ne pas licencier à tort et à travers et aux choix incohérents, au risque de banaliser, détériorer et désubstantialiser son image de marque. Pierre Cardin est souvent cité pour avoir autorisé sa licence, sur des produits trop éloignés de la mode et de la haute couture ;
  • Percevoir un loyer sous la forme de royalties fixes ou en pourcentage du CA réalisé, et pendant des contrats généralement conclus pour plusieurs années. Le rendement généré est quasi net, et ils n’ont à engager que des frais de défense de la marque en cas d’infraction, ou de renouvellement de protection à échéance d’un terme de 10 ans ;
  • Capitaliser en continu sur leur marque et en accélérer la valorisation financière, tant que les octrois de licences restent judicieux.

De son côté, le licencié tire profit de la renommée et de la notoriété d’une marque pour la commercialisation de ses produits et services. Et dans les faits, c’est surtout le niveau de cette notoriété et la puissance de la marque qui justifient ou non l’opération.

Seule ombre au tableau, il risque de se sentir isolé dans l’exploitation de la marque. En raison d’un faible accompagnement, être licencié plutôt que franchisé suppose une certaine expérience et une entreprise solide.

L’élargissement à un nombre croissant de secteurs d’activité

Historiquement utilisée dans la fabrication et la vente d’un produit dérivé issu du secteur culturel (Star Wars, Disney, Harry Potter…), la licence de marque a vu son champ d’application s’élargir progressivement :

  • Prêt-à-porter (Armani, MCS – l’ex-spin-off du cigarettier Marlboro),
  • Luxe (Ferrari),
  • Sport professionnel (les grands clubs de football),
  • Et plus largement le commerce de proximité et les services (à la personne, aux entreprises).

Parmi les concepts lancés ou diversifiés récemment comme tels on peut citer : BeHome Interiors, Blacksheeps, Glastint (par ailleurs déjà franchiseur), Kerboat Services Livroux, Not so Dark, Optical Factory, Prestige By Arthurimmo.com…

III/ Un contenu de la licence de marque plus riche qu’il n’y paraît

Un jeu de clauses usuelles et optionnelles, commun à de nombreuses formules du commerce organisé

Pour encadrer les conditions d’exploitation d’une marque et de ses signes distinctifs, le contrat de licence prévoit généralement les éléments suivants :

1/ Les conditions d’usage de la marque

Un cadre est posé pour prévenir tout risque de dénaturation ou de dépréciation ;

2/ Les produits et/ou services visés

L’usage de la marque ne vaut que pour un champ strictement défini, par exemple seule une gamme de produits, et exclut tout le reste  ;

3/ Les droits et devoirs respectifs 

Outre le règlement des royalties, cela peut impliquer que le licencié alerte son concédant s’il constatait des activités de contrefaçon, et un éventuel dépôt de plainte in solidum pour la défense de la marque ;

4/ Les services et assistance convenus

Ils sont bien plus limités qu’au sein d’un réseau de franchise par exemple ;

5/ La portée territoriale

Le contrat précise la zone géographique de distribution et/ou d’exploitation permise par le licencié ;

6/ Les revenus

Il s’agit de redevances ou de commissions sur ventes, forfaitaires ou proportionnelles au CA réalisé par le licencié sous la ou les marques visées. Les montants définis suivent logiquement la notoriété de l’ensemble ;

7/ La durée

Une clause vient prévoir une période d’au moins 3 années ;

8/ Les modalités de résiliation ou de renouvellement

Elles sont un peu moins strictes que pour les autres formules, dont la franchise ;

9/ L’attribution de juridiction

Les parties désignent le tribunal compétent en cas de litige. Une disposition loin d’être anodine quand il s’agit d’une marque étrangère ;

10/ La garantie de jouissance paisible de la marque

Cette clause est prévue pour protéger l’exploitant dans son travail de développement ;

11/ L’exclusivité territoriale

Elle est prévue pour les mêmes raisons que la clause précédente.  La licence est exclusive quand le propriétaire s’interdit d’utiliser la marque à des fins concurrentielles. Mais ce n’est qu’une option, car l’exclusivité n’est pas une cause essentielle à la licence simple.

Les autres obligations et dispositions à considérer avant d’envisager la licence de marque

  • Contrairement à la franchise, elle n’implique pas le versement d’un droit d’entrée, seulement une redevance ;
  • Le respect de la marque enseigne et de son image sont moins strictement encadrées dans une licence seule que dans un contrat de franchise. Le licencié n’est soumis qu’aux obligations envers la marque (respect de l’image, logo, éléments de langage…), il peut aménager son local comme il l’entend et il fixe ses pratiques commerciales selon son bon vouloir ;
  • Nullement tenu à une exclusivité d’enseigne, le licencié peut commercialiser plusieurs marques dans son point de vente. Mais en cas d’exclusivité, ou de quasi-exclusivité (avec une subtile différence que seul un avocat peut relever), les contrats restent éligibles à la Loi Doubin: le concédant est alors tenu de remettre au licencié un Document d’Information Précontractuelle (DIP) ;
  • Enfin, dans tous les cas et pour opposabilité aux tiers, les actes affectant la vie de la marque comme une transmission par exemple doivent faire l’objet d’une inscription à l’Institut National de la Propriété Intellectuelle (INPI).

Des modalités financières souples pour le réseau, que l’on soit propriétaire ou simple titulaire de la marque

A/ Le revenu

Pour respecter l’équilibre contractuel, les parties peuvent définir un montant des redevances ou royalties :

  • Fixe;
  • Proportionnel au chiffre d’affaires réalisé par le licencié;
  • Dégressif, au gré de paliers de CA franchis par l’entreprise licenciée ;
  • Ou encore mixte : le licencié verse chaque mois une redevance minimale, augmentée d’un pourcentage de son CA, lui-même fixe ou évolutif.

Ces montants, modalités de calcul et cette périodicité de versements doit être établie le plus précisément possible par le contrat de licence de marque.

B/ Les coûts

Déployer une licence de marque implique d’en être propriétaire ou titulaire :

  • Le propriétaire a dû déployer des efforts et consacrer du temps dans sa construction, son enregistrement, son déploiement et son entretien. Il est normal qu’il rentabilise son investissement ;
  • Le simple titulaire a dû verser une redevance d’exploitation à son propriétaire.

En outre et quel que soit le type de concédant, transmettre une marque française à un tiers requiert une déclaration de transmission auprès de l’INPI. Le coût de cette démarche est de 27 euros.

Enfin, certains travaillent avec des agents de licences de marque comme IMG Licensing, qui seront parfois plus efficaces pour leur trouver leurs licenciés et négocier des accords

IV/ Des niveaux de licence de marque en question

Si la licence n’implique en soi aucun transfert de savoir-faire ni de manuel opératoire, des clauses font généralement référence à un cahier des charges ou un référentiel de marque encadrant son usage.

Une pratique qui dégage différents niveaux de licence de marque

De plus en plus associée à un transfert de techniques et d’expériences, la licence existe aujourd’hui en au moins 3 versions :

  • La licence « sèche »: c’est sa version minimale et décrite jusqu’à présent dans cet article ;
  • La concession de marque: l’emploi d’une exclusivité territoriale fait basculer la licence de marque simple dans « la concession de marque ». Cette terminologie s’explique par le fait que l’exclusivité territoriale est, elle, une cause essentielle des contrats de concession. En concession de marque, l’entreprise concédante accorde obligatoirement à son concessionnaire cette exclusivité sur une zone géographique déterminée. Une formule qui se distingue de la concession commerciale ou de distribution classique, et a fortiori de la franchise, par moins de formation, d’assistance et de services.
  • La licence de concept: Il arrive que des enseignes dénomment leur contrat « licence de marque » mais qu’ils en dépassent l’objet initial. Ils veulent encadrer plus étroitement l’exploitation de leur concept, sans aller aussi loin qu’une franchise stricto sensu. La « licence de concept » s’assortit alors d’un certain nombre d’autres obligations, notamment en matière de savoir-faire et d’assistance.

De la vigilance nécessaire du futur concédant… et de ses conseils !

Quelle que soit l’imagination sémantique des enseignes, elles ne doivent jamais oublier qu’en cas de dépôt de plainte du licencié, les juges du fond sont souverains pour requalifier leur contrat si besoin.

Voilà pourquoi, afin d’aider les jeunes réseaux qui le consultent dans le choix du meilleur véhicule contractuel, Axe Réseaux passe suffisamment de temps à analyser le concept, la vision et les objectifs des dirigeants, et particulièrement sur :

  • La qualification en savoir-faire ou non des processus nécessaires à l’exploitation de leur concept : parle-t-on de processus métier originaux ou d’un simple ralliement autour d’une marque, d’une charte etc… ?
  • Le niveau de développement de notoriété procuré: repose-t-il sur la maîtrise d’un concept, la fourniture d’une assistance poussée, ou bien la notoriété de la marque suffit-elle en soi et se dispense de ces moyens ?
  • Le niveau d’exclusivité : Le partenaire est-il dépendant de fournisseurs, de logiciels, de partenaires ? Son chiffre d’affaires dépend-il de l’enseigne et dans quelle mesure ?

Conclusion

Nous espérons que ce panorama sur l’usage de la licence de marque vous permettra d’actualiser votre perception de cette formule, et de la choisir en connaissance de cause pour développer ou réorienter votre projet 😊 N’oubliez toutefois jamais que seul un professionnel (expert ou avocat) est en mesure de vous apporter l’éclairage nécessaire à votre décision.

  • Vous souhaitez vous lancer ? Soumettez-nous votre projet et nous saurons vous aiguiller.
  • Que vous doutiez ou partagiez mon point de vue, n’hésitez pas à entamer la discussion en commentaires, ou sur la page LinkedIn Axe Réseaux.
  • Enfin, retrouvez sur notre chaîne Youtube notre mini-série sur les fonctions clés des réseaux de franchise.