Uber fournit un ensemble de prestations proches d’une franchise. Relations et statuts sont différents, mais certaines bonnes pratiques digitales sont peut-être à importer dans les réseaux d’après Julien Siouffi, Associé chez Axe Réseaux.
L’amalgame est évidemment osé et exagéré. Pourtant, un franchiseur est évalué sur trois critères que sont la marque, le savoir-faire et le pilote probant. Force est de constater qu’Uber concentre les trois points : la marque est connue mondialement, le savoir-faire en terme de géolocalisation, d’attribution des courses, de mise en relation et de paiement est reconnu, et les pilotes sont probants, l’entreprise ayant expérimenté son activité dans de nombreuses villes avec des profils variés de chauffeurs. Ce sont donc les caractéristiques de base d’un franchiseur qui sont retrouvées, avec toutefois des moyens de diffusion très différents de la franchise classique.
Des spécificités qui posent des questions juridiques
La logique de plateforme et de digitalisation a été poussée à son paroxysme. Uber a automatisé le recrutement de chauffeurs, la communication et surtout la diffusion du savoir-faire, ne conservant que l’essentiel des contacts humains pour faire fonctionner ce qui s’apparente à une franchise. Précisons évidemment que les chauffeurs sont indépendants, et qu’Uber les oblige pratiquement à travailler en parallèle avec d’autres sociétés, afin d’éviter les recours certains en justice pour requalifier la collaboration en CDI. Le débat quant au statut juridique de ces travailleurs défraie d’ailleurs la chronique. Uber fait tout pour que la notion d’exclusivité sur la marque n’existe pas dans son fonctionnement. Il n’est donc pas possible de pleinement l’assimiler à une franchise au final, malgré certains points de similitude indéniables.
Des pratiques à importer
Le rapport contractuel avec la tête de réseau – si on peut l’appeler ainsi – est donc bien différent. Mais Uber acquiert la même légitimité grâce à son efficacité dans le recrutement, dans la diffusion du savoir-faire, ou encore dans la rapidité à se déployer et devenir opérationnel sur des territoires… et ce grâce à une digitalisation très poussée. Qu’il s’agisse de l’acquisition client ou de la diffusion du savoir faire, les pratiques sont clairement inspirantes. Ce n’est évidemment par le cas de ses habitudes dans la gestion des rapports humains et de l’harmonie sociétale, particulièrement polémique dans cette société. Si on oppose souvent à son modèle sa rentabilité inexistante, c’est oublier un peu rapidement que la société est dans une phase de conquête mondiale, forcément couteuse : les même reproches étaient faits à des start-up comme Google ou Facebook…
Si le modèle de la franchise est plus contraignant, mais riche de relations franchiseurs/franchisés denses émotionnellement, l’efficacité de la multinationale américaine doit aujourd’hui être mise au service du modèle vertueux de la franchise.
Julien Siouffi